Une lettre de Jean
Je suis descendu hier sur Corte… et comme chaque année, les touristes arrivent par vagues successives.
Dès juin, ce sont d’abord les retraités en autobus qui achètent sans réfléchir des souvenirs et des couteaux corses pas chers made in on ne sait pas où mais assurément en China, ou le drapeau tête de Maur et les serviettes de plage Corsica écrit en bien gros. Il y a aussi en ce moment, mais ils sont plus nuisibles, les bandes de vieux motards qui se la jouent méchants garçons en marge de la société, affublés de la panoplie complète neuve de Harley Davidson qui a dû leur coûter pas mal de pognon. C’est leur grande virée de l’année, la Corse, et ils nous le font savoir bruyamment. Ils font du bruit, ils adorent ça, et en fait ils nous emmerdent totalement à vouloir se montrer comme dans un défilé de haute couture qui remonte le cours Paoli de Corte. Ils ne savent pas se la faire discret, il faut qu’ils se montrent sinon ils n’existent pas. Ils garent leurs motos à plus de 40.000€ (!!) sur la place Paoli pour que tout le monde les voient. Ces groupes de motards alternent semaine après semaine avec d’autres, on croit voir les mêmes puisqu’ils sont tous identiques, ils se ressemblent tous, leur grande aventure est normative et ils ne peuvent absolument pas imaginer partir seuls. Ils roulent en bande, prennent toute la route et roulent comme des escargots quand ils ne s’admirent pas eux-mêmes. Des aventuriers de salon. Je les imagine d’ailleurs sur leur canapé le reste de l’année, bloqués devant la télévision et votant RN une bière à la main dans une maison en parpaing sans aucun goût. Bon, tu comprends que je ne les supporte pas du tout… À partir de juillet les familles vont arriver avec leurs gamins qui mangent des glaces, s’en mettent partout et crient dans les rivières. En septembre, les retraités reviennent, achètent toujours sans réfléchir des souvenirs made in on ne sait pas où mais assurément en China pendant que de nouveaux groupes de motards en quête de paraitre débarquent des ferries.
Voilà le décor… Ça donne envie n’est-ce pas ? Haha !! Si je le pouvais je les filmerais pour les inclure dans mon film de chroniques.
Putaing ce monde est pure misère culturelle !! Je sais bien qu’il ne faut pas juger son prochain mais difficile de ne pas être sarcastique quand je vois chaque année la médiocrité étendre de plus en plus ses tentacules de bêtise et de haine. L’acculturation est un virus mais je ne vois pas l’antidote. Pouvons-nous penser qu’ils puissent comprendre cette phrase de Nietzsche dans Zarathoustra : « Ce que tu as appelé monde, il faut commencer par le créer. Ta raison, ton imagination, ta volonté, ton amour, doivent devenir ce monde. »… On peut en douter.
Jean Froment